Echo Bruit
n° 132
03.2011
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Dossier :
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assises nationales de
la qualité de l’environnement sonore
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le magazine de l’environnement sonore
nous acceptons mieux un bruit si nous en comprenons le
sens et la nécessité. Lorsque les usines étaient installées au
cœur des villes et que les ouvriers étaient logés à proximité,
les bruits des ateliers ne choquaient personne, à certains
égards on en était même fiers. Dans nos villes modernes
où la tendance au zonage triomphe, au nom d’une certaine
conception de la fonctionnalité, notre perception est tout
autre. Ce qui tendrait à indiquer qu’une partie de la solution
consiste à accorder une juste part de mixité, mixité sociale,
mixité des activités, etc. L’autre remède consiste à considérer
la question du bruit parmi d’autres. C’est ce qui a été fait avec
les « zones calmes », mises en œuvre à partir de la directive
européenne de 2002, qui fait d’ailleurs référence à un concept
assez ouvert. Le niveau sonore y est pris en considération
comme un élément important mais certainement pas exclusif.
Cela implique pour tous ceux qui se préoccupent plus
particulièrement du bruit, la capacité à prendre ses distances
avec une conception strictement technicienne. Bien entendu,
tout cela est plus facile si la réflexion intervient en amont.
Et surtout, on voit bien à quel point cette philosophie est en
phase avec la notion de développement durable, qui envisage
l’environnement, l’économique et social comme les éléments
indissociables d’un ensemble cohérent.
Diriez-vous que les travaux des sixièmes assises nationales
de la qualité de l’environnement sonore ont fait écho à ce que
vous nous décrivez-là ?
Dominique Bidou
Sur le diagnostic, sans aucun doute.
Comme sur la nécessité de franchir un nouveau cap. Sur
les solutions et sur la méthode, nous sommes assurément
dans une phase encore exploratoire. De ce point de vue, les
travaux consacrés aux éco-quartiers ont ouvert des pistes
intéressantes. Comment intégrer la notion de qualité de
l’environnement sonore dès la conception de ces nouveaux
morceaux de ville qui se veulent exemplaires d’une urbanité
à la fois plus humaine et plus respectueuse des éléments
naturels. Au CIDB nous avons bien l’intention, dans la mesure
du possible, d’être partie prenante de ce qui se joue là.
Je ne veux cependant pas pêcher par naïveté. Affirmer, comme
je le fais, que l’on ne peut pas régler le problème du bruit
(des bruits) en traitant seulement les aspects techniques,
ne signifie pas que ces aspects techniques doivent être
purement et simplement ignorés. A cet égard, il n’est pas
vain d’espérer de nouveaux progrès. De même, l’arsenal
juridique a toute sa raison d’être, bien qu’une affaire traduite
au tribunal traduise l’échec d’un processus de conciliation qui
est toujours préférable.
Il est indiscutable que, depuis quelques années, la
profession d’acousticien s’est affirmée. Ils ne doivent
cependant pas avoir le monopole de la question du bruit.
Les autres concepteurs et acteurs de la ville doivent s’en
saisir à leur tour, les architectes, évidemment, mais aussi
les industriels, les aménageurs ou encore ceux qui ont en
charge l’organisation des circulations, etc. Au-delà, le bruit
doit être envisagé comme un enjeu de société, un enjeu
culturel et pédagogique. On observe dans ce domaine la
montée en puissance de mouvements nouveaux de mise en
valeur de l’environnement sonore et d’éducation au son, à
côté des mouvements traditionnels de défense, y compris
dans les lieux bruyants comme les salles de concerts. Le bruit
est partie intégrante de notre quotidien, le meilleur moyen
d’en maîtriser les excès consiste sans doute certainement à
le considérer sous tous ses aspects.
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