Echo Bruit
n° 136
g
Dossier :
Eco-quartiers et
environnement sonore
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le magazine de l’environnement sonore
et de l’urbanisme, au contact de réalisations de quartiers
durables. Le choix des terrains d’étude s’est alors porté sur
des quartiers européens : Bo01 et Augustenborg à Malmö
(Suède), Wilhelmina Gasthuis Terrein à Amsterdam (Pays-
Bas), Kronsberg à Hanovre et Vauban à Fribourg en Brisgau
(Allemagne).
L’une des recherches a été menée pour le Programme
Interdisciplinaire de Recherche Ville et Environnement
(PIRVE), créé en novembre 2006 par le CNRS, en partenariat
avec le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA)
et la Direction de la Recherche et de l’Innovation (DRI)
du Ministère de l’Écologie, du Développement Durable
et de l’Energie (MEDDE).
Quatre projets issus des appels
à projets 2008 et 2009 de ce programme ont porté sur les
ambiances urbaines, et en partie sur des questions relatives
à la qualité de l’environnement sonore, dont l’un sur les
quartiers durables
, dont cet article est tiré (
pirve.fr/). Ce travail a également été mené en parallèle avec
deux thèses de doctorat : l’une sur le paysage sonore dans
les quartiers Kronsberg et Vauban, et l’autre sur le paysage
multisensoriel dans les quartiers Bo01, Augustenborg et WGT.
Démarcheméthodologique : l’emboîtement
et la complémentation de méthodes
quantitatives et qualitatives
La méthode utilisée plus particulièrement dans le cadre de
l’élaboration d’une méthode de qualification des paysages
sonores dans les quartiers Kronsberg et Vauban repose sur
la qualification de tels paysages, ceux-ci étant définis comme
l’ensemble des relations sonores qui se tissent entre un
individu ou un groupe d’individus et son territoire de vie.
Le paysage sonore, dans la préoccupation opérationnelle
qui animait ce travail de thèse, prend la forme d’un système
tripartite permettant de relier le vécu sonore quotidien des
habitants à un contexte environnemental, socioculturel
et politique. Il repose alors sur l’analyse entrecroisée du
paysage raisonné, du paysage sonnant et du paysage auditif.
Le paysage raisonné
est la manière de penser le paysage
sonore, de le projeter. Les quartiers étudiés ont ainsi été
analysés à travers la lecture de documents écrits sur les
lieux et sur les projets, ainsi que sur des entretiens semi-
directifs avec des personnes chargées des projets. Le paysage
sonnant, en tant que réalité matérielle du paysage sonore, a
été analysé lors de dérives sonores paysagères, consistant
à parcourir le quartier et à porter une attention « flottante »
sur ses premières impressions auditives, retranscrites par la
suite dans un texte synthétique. Un diagnostic urbanistique
et paysager plus classique du quartier et de ses usages a
également été effectué à l’aide de relevés morphologiques
et thématiques, de photographies et d’enregistrements
audio. Ces deux analyses ont servi de contexte à l’étude du
paysage auditif, soit l’ensemble des expériences auditives
des habitants dans leur quartier, mises à jour grâce à
plusieurs méthodes d’enquête qualitatives : des entretiens
exploratoires dans la rue, des parcours sonores agrémentés
de cartes mentales sonores, et des journaux sonores.
Le journal sonore, méthode originale expérimentée dans
le cadre de cette recherche, consiste pour le participant à
consigner durant une semaine ses expériences sonores lors
de ses déplacements quotidiens et à qualifier les différentes
ambiances sonores de son quartier par différents moyens
d’expression (écriture, dessin, photographie, enregistrement
audio, etc.). Pour ce faire, un carnet, un plan du quartier, un
enregistreur numérique et un appareil photo étaient mis à
sa disposition durant environ une semaine. La méthode du
journal sonore permet d’accéder à des expériences (intimes),
des lieux (privés) et des temps du quotidien non atteignables
lors des entretiens exploratoires et des parcours sonores.
Source : Geisler, 2011
Fig. 1 — Carte mentale d’un parcours sonore, réalisée par une habitante du
quartier Vauban à Fribourg en Allemagne.