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Spécial « infrasons »
Photos 1 : Vue intérieure de la cabine de simulation
(gauche) sans la laine de roche / (droite) complètement terminée
Evaluation psychoacoustique de la gêne d’un
bang supersonique
Des études sur le bang supersonique et ses effets sur
l’homme ont été entreprises à l’Institut franco-allemand
de recherches de Saint-Louis (68) dès la fin des années
50 [1]. Il en ressortait qu’un bang supersonique ne provo-
que aucune lésion auditive sur l’homme. Seul un effet de
«sursaut» a été constaté et étudié [2]. Ces travaux ont
été réalisés pour des signaux correspondant à un bang
se propageant en extérieur.
Toutefois, il faut distinguer deux types de conditions
d’écoute quand on étudie la perception du bang superso-
nique : l’écoute du bang à l’extérieur et à l’intérieur d’une
habitation. Dans la première condition, le stimulus est
une onde en N ou en U (figures 4 et 5) ; dans la seconde
condition, il faut prendre en compte les sons «secondai-
res», rayonnés par des structures mises en vibration par
l’onde très basse fréquence du bang.
Aux États-Unis, différents laboratoires ont travaillé sur la
perception du bang supersonique en condition d’écoutes
extérieure et intérieure et en particulier sur la sonie et la
gêne provoquées par de tels bruits. Les premières expé-
riences ont été menées avec des signaux de bang super-
soniques primaires [3]. Les auteurs ont trouvé que la partie
basse du spectre (<40 Hz) n’a pas d’influence sur la sonie.
Mais les expériences ayant été menées sous casque, les
très basses fréquences (TBF), inférieures à 20 Hz, n’ont
donc pas été reproduites correctement, ce qui explique
peut-être leurs résultats. Plus tard, Niedzwiecki et Ribner
[4] ont effectué des mesures avec le même type de signaux
(onde en N) cette fois-ci dans une cabine, en simulant le
champ libre. Dans cette cabine, d’un volume de 2,1 m3,
les signaux reproduits atteignaient 100 Pa pour une bande
de fréquence comprise entre 0,1 et 5 000 Hz. La sonie
et la gêne semblaient diminuer quand on supprimait les
TBF (< 50 Hz), mais les effets n’étaient pas significatifs.
D’autre part, les mesures de sonie et de gêne n’étaient
pas équivalentes c’est-à-dire que des mesures de sonie
ne suffisaient pas à expliquer la gêne.
Depuis les années 90, la NASA a repris des études sur la
perception des bang supersoniques pour différentes natures
de signaux (en condition d’écoutes intérieure et extérieure)
en faisant varier différents paramètres sensibles comme le
temps de montée, le niveau et la durée des signaux [5] [6]
[7]; on trouve un résumé de leurs travaux dans Leatherwood
et al., [8]. Leurs études ont été menées soit en champ libre
dans une cabine de leur conception d’un volume assez réduit
(de l’ordre de 1,5 m3) capable de reproduire des niveaux
jusqu’à 190 Pa avec une large bande passante, soit dans
une habitation. Ils ont étudié plusieurs formes de bang,
et notamment des formes d’ondes pour lesquelles le pic
d’énergie est atteint en deux étapes : une croissance initiale
rapide, qui permet d’atteindre une pression intermédiaire,
suivie d’une croissance plus longue jusqu’au pic de pression
maximum (FSM pour front-shock-minimized). Les pentes
des deux parties de l’attaque sont différentes. Les bangs
de type FSM étaient jugés moins forts que les ondes en N
pour une même pression maximale [6].
De plus, pour les bangs perçus à l’extérieur, la sonie et la gêne
sont fortement corrélées ce qui n’est pas le cas en situation
d’écoute à l’intérieur d’une habitation [7]. Un bang sera jugé
aussi gênant qu’un bruit blanc stationnaire si son niveau est
22 dB SPL supérieur au niveau du stationnaire.
Fidell et al. [9] ont mené une étude comparative entre diffé-
rents signaux de même famille (bruits d’avion par exem-
ple) et des bangs supersoniques perçus à l’extérieur. Ils
ont montré que la présence de TBF (<90 Hz) a une impor-
tance dans la perception de la gêne et que, lorsque les
TBF sont présentes, la sonie est très corrélée à la gêne.
Enfin la durée d’un bang supersonique n’a pas d’influence
sur la gêne perçue.
La cabine de simulation nous permet de contrôler tous les
paramètres physiques du bang. Il s’agit maintenant d’étu-
dier l’effet des variations de ces paramètres sur la percep-
tion, en particulier sur la sonie et la gêne perçues.
Nous avons montré [10] que la sonie et la gêne procurées
par des ondes en U étaient comparable à celles procurées
par les ondes en N. Nous avons donc choisi de travailler
sur la sonie et la gêne des ondes en N. Les signaux avec
lesquels nous allons travailler ont été synthétisés numé-
riquement pour contrôler tous les paramètres qui varient
dans les intervalles décrits ci-dessous.
-
Δ
p peut varier (voir fig. 6) entre 100 et 200 Pa
⇒
ainsi le
Δ
p maximum est de 110 dB SPL crête soit 6 à 7 Pa.
Nous ferons varier les niveaux entre 85 dB SPL crête et
110 dB SPL crête,
- le temps de montée Tm et le temps de descente Td des 2 pics
présents dans les ondes en N varient entre 1 et 25 ms,
-
Δ
t (Dt), la durée entre chacun des 2 pics (et durée inter-
pic) est comprise entre 75 et 500 ms.
Fig. 6 : Onde en N et paramètres physiques associés