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Spécial « Congrès Acoustics 2012 »
Caractérisation physique et perceptive de bruits routiers urbains pour une meilleure évaluation de la gêne sonore
Pour atteindre cet objectif, une première étape consiste
en l’étude de la gêne due au bruit routier en laboratoire.
Cette étude est basée sur une typologie perceptive et
cognitive de bruits de passage de véhicules routiers
urbains [11].
Dans un premier temps, cette typologie perceptive et
cognitive est brièvement décrite dans une section dédiée.
L’étude de la gêne due aux bruits de ces différentes caté-
gories est ensuite présentée avec la méthode expérimen-
tale utilisée, les résultats et une discussion des résultats.
Enfin, les principales conclusions sont rappelées.
Une typologie perceptive et cognitive de bruits
routiers urbains [11]
Les modèles d’émission utilisés pour générer les cartes
de bruit sont basés sur des critères physiques (par exem-
ple [12]). Trois d’entre eux ont été croisés pour former une
typologie physique a priori de bruits routiers urbains :
- «le type de véhicules» détaillé en bus, deux-roues, poids
lourds, et véhicules légers,
- «le type d’allures» détaillé en allure accélérée, allure
décélérée, et allure stabilisée,
- «le type de morphologies urbaines» détaillé en rue en
«U», et rue en tissu ouvert [11].
Dans l’optique d’évaluer la pertinence perceptive d’une telle
typologie physique, 57 bruits de passage ont été extraits
d’une série d’enregistrements stéréophoniques effectués
dans l’agglomération lyonnaise. Les enregistrements ont
été réalisés au moyen d’un système ORTF (couple de micro-
phones Schoeps MSTC 64, avec des bonnettes anti-vent
BBG windfields), puis stockés sur un enregistreur porta-
ble (TASCAM HD-P2, signaux échantillonnés à 44,1 kHz
avec une résolution de 24 bits). L’axe du couple ORTF a
été placé perpendiculairement à l’axe de la route, à une
hauteur d’1,5 m et à au moins 2 m de toute paroi réflé-
chissante [13]. La durée des bruits de passage extraits
(entre 3 et 9 s) est contrainte par :
- la nécessité de contenir uniquement des informations
auditives relatives au bruit de passage considéré, et
- la nécessité de contenir suffisamment d’informations
auditives pour que le bruit de passage considéré puisse
être identifié par des auditeurs.
Les 57 bruits de passage ont été ensuite soumis à un
panel de sujets via une tâche de catégorisation libre asso-
ciée à une tâche de verbalisation libre. Cette procédure
(cf. [14] pour une description) est particulièrement adap-
tée à la compréhension des mécanismes psychologiques
qui sous-tendent le processus de catégorisation naturelle
[15, 16]. L’intérêt est alors de confronter une organisa-
tion choisie a priori à partir de critères physiques, à une
organisation partagée par les individus, en accord avec
leurs précédentes expériences sensorielles. Les analy-
ses effectuées (analyse statistique de la catégorisation
libre et analyse linguistique des verbalisations libres [11])
ont résulté en la proposition d’une typologie perceptive et
cognitive composée de 7 catégories de bruits de passage
de véhicules routiers. Ces 7 catégories sont principale-
ment structurées par les critères a priori «type de véhicu-
les» et «type d’allures» (cf. 1ère colonne du tableau 1), en
relation avec les propriétés acoustiques des stimuli iden-
tifiées par les sujets. Le dernier critère «type de morpho-
logies urbaines» n’a pas joué un rôle significatif dans le
processus de catégorisation, même s’il a été identifié par
les sujets. Des jugements négatifs ou d’acceptabilité ont
été émis à l’encontre des bruits de passage, et reliés à
leurs propriétés spectrales et temporelles.
Quatorze bruits de passage ont été ensuite sélection-
nés, puis soumis à un nouveau panel de sujets via un test
d’évaluation de la dissimilarité, utilisant la méthode de
comparaison par paires. L’objectif de cette expérience
était de tester la robustesse de la typologie perceptive
et cognitive proposée. Les analyses statistiques prati-
quées sur les jugements de dissimilarité émis ont conduit
à l’échelonnement des 14 bruits de passage dans un
espace perceptif à 2 dimensions. La première dimen-
sion est expliquée par 2 indices décrivant des aspects
temporels liés aux différentes allures : la rugosité R liée
à l’évolution périodique de l’enveloppe temporelle, et le
taux d’accroissement du niveau sonore en fonction du
temps lié à l’évolution temporelle globale. La seconde
dimension est expliquée par l’identification des véhicules
et un indice spectral, l’indice L
MF
(le niveau de pression
sonore équivalent pondéré A entre les bandes de tiers
d’octave centrées sur 315 et 1 250 Hz [10]).
La confrontation des résultats des deux expériences décri-
tes ci-dessus appuie la proposition de la typologie percep-
tive et cognitive. Le critère «type de véhicules» semble
être un critère de nature catégorielle lié à l’identification
de la source de bruit, et expliqué par un indice spectral
décrivant les dissimilarités entre types de véhicules. Le
critère «type d’allures» semble être un critère de nature
continue expliqué par une variation d’indices temporels
décrivant l’évolution périodique de l’enveloppe temporelle,
ou l’évolution temporelle globale.
Indicateurs de gêne pour les 7 catégories
perceptives et cognitives
En accord avec notre objectif principal, chaque catégorie
de la typologie perceptive et cognitive de bruits de passage
de véhicules routiers urbains est étudiée séparément du
point de vue de la gêne sonore en laboratoire.
Sept tests d’évaluation de la gêne sont ainsi mis en
place.
Méthode expérimentale
Stimuli
L’objectif de cette expérimentation est de définir des
indicateurs de gêne qui soient capables de prendre en
compte des facteurs acoustiques qui influencent les
réponses de gêne.
Selon les catégories, 4 ou 5 bruits de passage sont sélec-
tionnés, du plus représentatif au moins représentatif, à
l’intérieur de chaque catégorie [11]. Les bruits de passage
sont ensuite égalisés à 7 valeurs différentes de l’indice
L
Aeq,T
de 50 à 62 dB(A) par pas de 2 dB(A). Cette dyna-
mique est choisie en cohérence avec celle observée au
cours d’une enquête in situ [17], à laquelle nos résultats
seront confrontés dans une future étape.
Ainsi, 2 facteurs expérimentaux sont introduits : «le Niveau
Sonore» et «la Source de Bruit», avec respectivement 7 et
4 (ou 5) modalités, pour un nombre de stimuli de 28 (ou
35) suivant la catégorie étudiée (cf. Tableau 1).