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Spécial « infrasons »
De période comprise entre 5 et 8 s, les signaux de houle
ont un maximum d’énergie proche de celui des explosions
de 1 kilotonne, mais se limitent toutefois à une partie
restreinte de leur spectre. Souvent localisées au centre des
dépressions, les houles océaniques résultent du couplage
avec l’atmosphère des ondes entretenues à la surface
de l’océan. Une description théorique de ce mécanisme
de production relie l’amplitude du signal de pression à la
hauteur et à la fréquence d’oscillation des vagues. Dans
des conditions de propagation favorables, les fortes houles
sont détectées sur toutes les stations du SSI.
À titre d’exemple, la station IS34 installée en Mongolie enre-
gistre entre les mois de décembre et février la houle de l’At-
lantique Nord (Figure 7). À cette période de l’année, dans
l’hémisphère Nord, les vents dominants dirigés vers l’Est
favorisent la propagation de ces signaux dans des guides
stratosphériques. Superposées à la houle, des ondes de
période comprise entre 20 et 50 s sont aussi fréquemment
observées. Ces ondes ont pour origine l’écoulement de
vents forts (vitesse supérieure à 20-30 m/s) selon un axe
perpendiculaire à l’axe des chaînes montagneuses. Ces vents
produisent des ondes stationnaires à l’origine de turbulen-
ces vers 20-25 km d’altitude et des ondes de montagnes
à plus haute altitude. Faiblement atténuées, ces ondes se
propagent sur de grandes distances, et comme les signaux
de houle, leur propagation est régie par la dynamique des
vents dans la stratosphère. Des corrélations entre les varia-
tions saisonnières de l’amplitude de ces ondes et celles des
vents zonaux et méridiens
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dans la région source présu-
mée (entre 1 500 et 5 500 m d’altitude) ont clairement été
mises en évidence.
Fig. 7 : Élément central de la station infrasons IS34 installée
en Mongolie. Le capteur est placé dans une buse, au
centre d’un système de filtrage acoustique atténuant
le bruit lié aux turbulences atmosphériques locales.
Cette station enregistre la houle de l’Atlantique
Nord à plus de 10 000 km de distance
La figure 8 montre les directions principales de la houle
détectée à l’échelle du globe sur une période de cinq années.
Les détections sont quasi continues avec des variations
cycliques annuelles marquées. Dans l’hémisphère Sud, de
fortes dépressions circulent d’Ouest en Est le long d’une
ceinture péri-Antarctique tout au long de l’année. Dans l’At-
lantique Nord, elles ont généralement pour origine de la côte
Est des États-Unis (Caraïbes, parfois au Sud du Groenland)
et, suivant le Gulf Stream, traversent l’Océan Atlantique
avant de disparaître en Mer du Nord. La périodicité annuelle
des détections est principalement attribuée à des effets de
propagation. Les simulations expliquent ces alternances par
l’apparition et la disparition des guides d’ondes stratosphé-
riques avec les inversions saisonnières des vents zonaux.
Compte tenu des distances considérables parcourues
par ces ondes, les outils de simulation utilisés doivent
être capables d’intégrer des variabilités importantes des
champs de vents tout au long de la trajectoire. L’intérêt
d’utiliser les signaux émis par la houle océanique, qui est
de mieux en mieux décrite et modélisée, par exemple
par la National Oceanic and Atmospheric Administration
(NOAA), pour renseigner en permanence et en tout point
du globe sur la dynamique des grands courants stratos-
phériques, apparaît alors clairement pour décrire la dyna-
mique de la haute atmosphère à l’échelle du globe.
Fig. 8 : Détection globale de la houle océanique et distribution
des azimuts pour 41 stations du SSI. Les stations sont
triées par latitudes croissantes. La couleur indique pour
chaque station l’azimut moyennée sur des périodes
d’une semaine. L’échelle grisée code le rapport de la
vitesse du vent ajoutée à la vitesse du son à 50 km
d’altitude à la vitesse du son au sol. Au-dessus de 1,
un guide d’onde stratosphérique apparaît favorisant
la propagation vers l’Est. Au-dessous de 1, les vents
soufflent dans la direction opposée favorisant la
propagation vers l’Ouest. Les détections reflètent au
premier ordre les inversions saisonnières des jets qui
sont en opposition entre les hémisphères Nord et Sud.
Interaction entre les ondes de grande échelle et
le climat
Les orages atmosphériques constituent une autre source
importante d’infrasons (environ 2 000 orages sont comp-
tés en permanence sur Terre). Les stations situées à
moyenne et basse latitudes enregistrent en continu de
telles perturbations. Plusieurs mécanismes de sources
sont identifiés. Le tonnerre est produit par un chauffage
et par les forces électrostatiques de l’orage. Les fréquen-
ces des infrasons sont élevées et atteignent la gamme
des fréquences audibles. Ces signaux se propagent rare-
ment au-delà de 200 km de distance.
D’autres ondes de période de l’ordre de la dizaine à
plusieurs dizaines de secondes sont générées par les
mouvements convectifs des masses d’air.
4-Vents zonaux et vents méridiens : les premiers suivent un parallèle tandis que
les seconds suivent un méridien, qui correspond au lieu des points ayant la même
longitude.
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