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Diffraction, diffusion, réfraction, turbulence et
écoulements complexes
L’étude du bruit des aéronefs pose encore des difficultés
et nécessiterait aujourd’hui la définition d’une méthode
de calcul opérationnelle intégrant des phénomènes de
propagation complexes. Encore une fois se posent ici les
problèmes de couplage/chaînage des modèles.
De plus, deux aspects physiques ont été évoqués :
- La mesure in situ et la modélisation de la diffusion par
des surfaces en zone urbaine (par les façades par exem-
ple) et en acoustique des salles, domaine dans lequel la
diffusion est reconnue comme primordiale.
Pourtant, les propriétés de diffusion des matériaux ne
sont toujours pas mesurables ailleurs qu’en laboratoire et
ne sont pas prises en compte dans la plupart des codes
de calculs ;
- La diffraction en espace clos et principalement à proxi-
mité des sources et des écrans. La prise en compte de
ce phénomène physique est très coûteuse en temps de
calcul mais paraît nécessaire. Il faudrait donc mettre au
point des méthodes de calculs rapides de type ingénierie
prenant en compte la diffraction dans ces conditions de
champ proche assez différentes des situations de diffrac-
tion observées en acoustique extérieure.
Incertitudes, estimation de grandeurs représentatives
et validation des méthodes de calcul
Ce domaine a été illustré à l’aide d’un exemple sur l’estima-
tion de l’émergence conformément à la norme de mesu-
rage NF S 31-010. Ces travaux ont été réalisés dans le
cadre de la commission de normalisation S30J. Ils démon-
trent que les pratiques sont mal cadrées et qu’il existe
une divergence de lecture et d’interprétation des normes
(ex : dispersion des valeurs d’émergence de 2 à 10 dB(A)
selon les opérateurs).
Or, on sait que bon nombre de situations de gêne existent
pratiquement indépendamment de la valeur d’émergen-
ce
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et que de ce fait bon nombre de situations de gêne
ne dépendent pas directement de l’état de conformité au
sens strict mais plutôt du contexte général. Les experts
acousticiens intègrent donc implicitement cette notion.
Nos pratiques d’acousticiens sous-entendent ainsi que
les critères réglementaires ne sont pas toujours adaptés
ou sont tout au moins fréquemment insuffisants et nous
faisons appel à tout un arsenal de méthodes et d’indica-
teurs complémentaires qui ne sont pas toujours partagés
ni normalisés. La question est de savoir si cette démar-
che, légitime puisqu’elle tente de répondre au problème
de la gêne dans son ensemble, pourrait être menée de
manière plus transparente avec des méthodes mieux
partagées et plus objectives. Un inventaire d’indicateurs
acoustiques et vibratoires est actuellement en cours en
commission S30M de l’AFNOR.
Une première étape vers cette transparence va consis-
ter à intégrer les notions d’incertitude au niveau norma-
tif, ce qui est en cours (ex : Annexe de la nouvelle version
de la norme NF S 31-010 pour produire des distributions
statistiques d’émergence ou les travaux sur la définition
des incertitudes liées aux effets météorologiques dans
la norme NF S 31-110).
Les échanges de cet atelier ont également porté sur la
nécessaire distinction entre la variabilité des niveaux sono-
res (liée aux phénomènes physiques régissant la propaga-
tion du son comme les effets de sol et les effets météo-
rologiques) et les incertitudes associées à ces niveaux
sonores, qu’ils soient mesurés (incertitudes métrologi-
ques et méthodologiques) ou calculés (incertitudes des
modèles de prévision).
Le besoin de glisser peu à peu vers des approches permet-
tant d’associer à des valeurs uniques «d’exposition», des
risques de dépassement se fait expressément sentir. Cela
nécessitera certainement une révision des seuils et des
approches réglementaires ainsi que l’utilisation de nouveaux
indicateurs. Il faut noter que dans un tel contexte, l’expert
acousticien ne serait plus à même d’être le seul arbitre,
mais partagerait ses responsabilités avec le décideur
en fournissant des éléments comme : « x% de risque de
dépasser le seuil réglementaire ».
On peut aussi proposer de nombreuses approches, à partir
des indicateurs existants mais qui ne sont pas encore
repris par la réglementation. Le fait, par exemple, d’as-
socier des critères événementiels à des niveaux sonores
maximaux pourrait mieux traduire les problématiques de
perturbations du sommeil.
Cette problématique de la nécessité de définir de nouveaux
indicateurs a d’ailleurs été évoquée lors de nombreuses
sessions plénières au cours des 6
es
Assises.
Enfin un dernier point a été évoqué sur la validation expé-
rimentale des prévisions à grande distance (500 m pour
les transports terrestres et 10 km pour les aéronefs) ou
en milieu bruité difficilement maîtrisable (milieu urbain par
exemple), car c’est aujourd’hui un challenge expérimen-
tal. Ceci démontre que, contrairement à l’idée souvent
répandue que mesurer le niveau sonore induit par une
source particulière n’est plus un problème aujourd’hui,
force est de constater qu’il reste encore des progrès à
faire dans ce domaine.
Selon les témoignages post-réunion, cette journée, qui a
rassemblé plus d’une cinquantaine de personnes, a été
très bien perçue. Des possibilités de collaboration entre
certains participants ont aussi été évoquées.
1- Journée organisée par le Groupe Acoustique du Bâtiment et de
l’Environnement (GABE) de la Société Française d’Acoustique et le GDR
CNRS 3372 VIlle SIlencieuse DuraBLE (VISIBLE) avec le soutien du CIDB.
Contacts :
2- c.f. par exemple, les remarques de Thierry Mignot acousticien et expert
judiciaire dans la plénière sur les approches réglementaires organisée dans le
cadre des 6es Assises.