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d’origine génétique (donc transmises par les parents), les
surdités néonatales restantes étant attribuables à des
accidents infectieux ou toxiques en période périnatale,
particulièrement chez les nouveau-nés ayant dû séjourner
en soins intensifs. Le risque de surdité dans ce contexte
était alors estimé à 1/80 il y a encore peu de temps, il
peut vraisemblablement diminuer en relation avec une
meilleure maîtrise des médicaments potentiellement toxi-
ques pour l’audition.
En 2008, cela reste un dogme que les surdités neuro-
sensorielles ne peuvent guérir ou régresser sous l’effet
d’aucun traitement médical ou chirurgical. En effet, ces
surdités résultent de l’absence ou de la mort de cellu-
les sensorielles qui sont irremplaçables. Cependant,
certaines études chez l’animal ont déjà permis de mieux
comprendre quelques étapes de la vie et de la mort des
cellules sensorielles auditives, ce qui ouvre peut-être la
voie à de futurs traitements géniques ou par biomolécu-
les. Ces travaux ont aussi débouché sur quelques résul-
tats concrets dans de rares cas particuliers. Par exem-
ple, il existe quelques possibilités de tenter de préserver
l’audition immédiatement après un traumatisme acousti-
que aigu en contrôlant certains mécanismes de protection
et de réparation cellulaire, sans garantie de succès hélas.
De manière générale, les travaux récents ont apporté une
meilleure compréhension des mécanismes ototoxiques
capables de léser l’oreille interne et les neurones audi-
tifs : comprendre n’est pas guérir, mais ouvre la voie à
des mesures de prévention.
Depuis quelques années, toutes ces surdités, quels que
soient leur degré et leur type, chez l’enfant ou l’adulte, sont
appareillables avec un grand bénéfice à moyen terme. Il est
important de rappeler que le bénéfice n’est pas immédiat
en général, mais il nécessite presque toujours quelques
mois d’habituation avec port régulier de l’appareillage, et
ajustement régulier de ses réglages. Chez l’enfant, une
éducation spécialisée ou adaptée peut être utile, selon le
degré de surdité initial et le retard éventuel de langage
qui y était attaché.
Comme il est maintenant bien établi que la privation senso-
rielle est nuisible au fonctionnement des centres cérébraux
auditifs, tandis qu’à l’inverse, la réhabilitation par appareil
est d’autant plus facile et bénéfique qu’elle est effectuée
précocement, le dépistage et le diagnostic précis des
surdités sont donc un challenge de plus en plus impor-
tant. Il peut désormais être abordé par certaines métho-
des objectives très précises, qui viennent compléter les
méthodes de dépistage de masse par simple audiomé-
trie subjective.
Au cours des 20 dernières années, l’enregistrement des
otoémissions acoustiques, sons de très faible niveau émis
vers le conduit auditif (de manière rétrograde) par certaines
cellules de l’oreille interne lorsqu’elles sont bien fonction-
nelles, a été développé par plusieurs méthodes complé-
mentaires, qui sont maintenant implémentées dans de
nombreux appareillages disponibles dans le commerce.
S’il y a des otoémissions, le patient a une audition quasi
normale (sauf exceptions dans des cadres bien précis), et
s’il n’y a pas d’otoémission, un bilan audiologique complet
s’impose à la recherche d’une surdité (figure 1).
Fig. 1 : Les otoémissions acoustiques (absentes sur le diagramme
du haut, présentes en bas) sont des ondes de pression
acoustique, donc d’authentiques sons enregistrables dans
le conduit auditif externe, et dont la présence indique que
la cochlée amplifie et filtre bien le son.
On les utilise en dépistage de routine car leur absence
est un signe fiable de surdité, et leur présence un
signe crédible de bonne audition, sauf exceptions.
En complément, des appareils capables de détecter auto-
matiquement les potentiels auditifs évoqués (réponses
électro-encéphalographiques issues du système nerveux
auditif, lorsqu’on le stimule par des sons brefs) ont été mis
au point : ils permettent de savoir si le sujet testé entend
ou non un son de niveau moyen. Ces deux tests, séparés
ou combinés, permettent en quelques minutes, installa-
tion comprise, de savoir si un nouveau-né entend ou pas,
les appareils pouvant être utilisés par du personnel abso-
lument pas spécialiste de l’audition, et dans un local ordi-
naire. La pratique du dépistage auditif par ces moyens a
été généralisée à tous les nourrissons en maternité dans
de nombreux pays, au cours des 10 à 15 dernières années.
On peut regretter que la France ait pris du retard dans ce
domaine car on continue à n’y identifier des surdités de
l’enfant que vers l’âge de deux ans, devant un retard de
langage, alors qu’en anticipant l’appareillage aurait évité
ce retard. À visée cette fois diagnostique, dans le cadre
de bilans ORL plus approfondis et plus longs, de nouveaux
tests objectifs basés eux aussi sur le recueil de potentiels
électriques issus des cellules sensorielles et neurones
auditifs donnent accès à des fonctions neurales auditives
plus centrales, incluant les boucles réflexes de protection
contre les sons forts, et les interactions binaurales.
Tous ces tests permettent non seulement des mesures
objectives précises qui permettent le diagnostic fin d’une
atteinte auditive, mais aussi un suivi individualisé dans le
temps. Il serait donc tentant d’en utiliser certains de manière
plus systématique chez l’adulte, par exemple dans l’industrie
(particulièrement en cas de notion d’exposition sonore, ou
sonore combinée à des produits chimiques toxiques pour
Progrès dans le domaine de l’acoustique physiologique, applications aux surdités