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En résumé, l’indication de l’EAS telle que la définit le
fabriquant préconise une intelligibilité maximale de 60%,
elle correspondrait selon notre modèle à une fréquence
de coupure passe-bas comprise entre 700 et 1 000 Hz.
Cela équivaut à une frontière entre la partie acoustique
et la partie électrique située à 1 tour ¼ de la base de
la cochlée. Cette frontière semble compatible avec les
contraintes mécaniques liées à l’insertion du porte-élec-
trodes dans la cochlée. En effet la partie traumatisée par
le porte-électrodes lors de la chirurgie correspond au
premier tour de cochlée.
Afin de mieux appréhender ce à quoi nous pouvons nous
attendre au niveau des résultats, une autre étude que nous
avons menée a consisté à simuler un implant EAS sur une
population de 24 sujets normo-entendants en fonction de
la fréquence de transition acoustique-électrique ainsi que
du nombre de canaux de la partie électrique. Nous avons
pour cela utilisé un vocoder dont la technique est décrite
par Shannon et coll [14].
L’exemple figure 5, nous reproduit le spectrogramme
du mot «le bouchon» encodé de la même manière qu’un
système électrique-acoustique ayant une fréquence de
transition acoustique-électrique de 500 Hz et un nombre
de 4 canaux sur la partie électrique.
Les résultats résumés figure 6 montrent que malgré une
résolution fréquentielle très dégradée dans la partie qui
encode les hautes fréquences, les 500 premiers Hz en
acoustique combinés à 4 canaux de la partie électrique
suffisent pour restaurer une bonne intelligibilité en milieu
calme. Conjointement, pour les 707 Hz exploitables en
acoustique, 3 canaux électriques suffisent ; pour 1 000
Hz, 2 canaux ; et 1 400 Hz, 1 seul canal. Ces résultats
sont spectaculaires, car cela voudrait dire que dans le
silence et avec un reliquat sur les basses fréquences,
peu de canaux électriques sont nécessaires pour obtenir
une très bonne intelligibilité. Nous avons mené ce même
genre d’étude avec de la parole bruitée. Pour des raisons
de simplification nous n’avons pas voulu exposer très
précisément les données. Mais, il faut savoir qu’avec un
reliquat de 707 Hz et 4 canaux, nous obtenons une intelli-
gibilité de 94% avec un rapport signal/bruit de +6 dB (le
bruit étant du cocktail party).
En résumé, l’utilisation d’un système électrique-acoustique
pour des patients ayant des reliquats exploitables jusqu’à
707-1 000 Hz avec une intelligibilité comprise entre 30 et
60% semble être une solution optimale d’un point de vue
théorique. Cependant, 1- les contraintes et risques liés à
la chirurgie de l’oreille (risque de cophose) doivent être
envisagés et étudiés afin d’être au maximum contrôlés et
limités ; 2- les résultats obtenus chez des patients à long
terme sur de grosses séries doivent être analysés.
Les résultats
La technologie EAS a démontré des résultats bien supé-
rieurs à ceux mesurés chez des patients partiellement
sourds qui utilisent seulement les aides auditives. Les
avantages de l’EAS ont été démontrés dans de nombreu-
ses études. La figure 7 résume les résultats obtenus dans
trois études [11,5,6] qui ont mesuré les scores en recon-
naissance de monosyllabes avec l’EAS et avec l’aide audi-
tive. En moyenne, les scores de l’EAS sont supérieurs de
plus de 50% aux scores électrique seul et acoustique seul.
La combinaison des deux modalités acoustique-électri-
Stimulation Electrique-Acoustique (EAS) : De nouvelles perspectives pour le traitement des surdités partielles
Fig. 5 : Spectrogramme du mot «le bouchon» encodé par un
implant EAS pour la situation Fc=500 Hz avec 4 canaux
électriques. Les accolades montrent les différentes
bandes : A = stimulation acoustique ;
1, 2 ,3 et 4 = n° des canaux électriques simulés.
Spectrogram of the French word «le bouchon»
encoded for the situation Fc = 500 Hz with 4
electric channels. The brackets show the different
bands: A = acoustic stimulation; 1, 2, 3 and 4 =
n° of the simulated electrical channels.
Fig. 6 : Intelligibilité des syllabes (%) en fonction de la fréquence
de coupure, en milieu calme. Chaque point correspond à la
moyenne des résultats sur les 24 sujets normo-entendants.
Les barres horizontales représentent l’erreur standard. Les
courbes représentent respectivement, du bas vers le haut,
stimulation acoustique seule (♦), stimulation acoustique
+ 1 canal électrique (■), stimulation acoustique + 2
canaux électriques (▲), stimulation acoustique + 3 canaux
électriques (●), et stimulation acoustique + 4 canaux
électriques (×). La compréhension est restaurée (>90%)
grâce à 1 canal électrique pour un malentendant avec
des restes jusqu’à 1400 Hz, grâce à 2 canaux avec des
restes jusqu’à 1000 Hz, 3 canaux avec des restes jusqu’à
700 Hz et 4 canaux avec des restes jusqu’à 500 Hz.
Syllables intelligibility (%) depending on the cut-off
frequency between acoustic and electrical stimulation, in
quiet (mean results on 24 normal-hearing people). The
curves represent respectively, from the bottom to the
top, acoustic stimulation only (♦), acoustic stimulation +
1 electric channel (■), acoustic stimulation + 2 electric
channels (▲), acoustic stimulation + 3 electric channel
(●), and acoustic stimulation + 4 electric channel (×).
The understanding is restored (> 90%) thanks to 1
channel if the hearing-impaired person has residual
hearing until 1400 Hz, thanks to 2 channels with
rests until 1000 Hz, 3 channels with rests till 700 Hz
and 4 channels with residual hearing till 500 Hz.