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Approfondissons…
Acoustique
&
Techniques n° 42-43
après 1945. Au début, la généralisation des véhicules
à moteur rencontra l’assentiment de la population
mais personne n’avait prévu le caractère exponentiel
qu’elle allait prendre. Les administrations réagirent en
planifiant et en construisant un réseau routier largement
dimensionné (jusqu’en 1970 environ) et en adaptant les
villes à l’automobile - le credo de l’époque. En outre, tout
le monde était convaincu que l’on disposerait toujours
des moyens nécessaires à la maîtrise des inconvénients
qu’entraînent les nouvelles techniques (
« Tout est toujours
faisable à condition de savoir planifier »
), ce qui contribuait
largement à l’optimisme général.
Ce n’est que plus tard, vers la fin des années 60, que l’on
commença à émettre des réserves dues au
« caractère
inhospitalier de nos villes »,
un aspect que confirment
les protestations de citadins de plus en plus sensibilisés
au problème. Les voitures furent bannies des zones
piétonnières ; leur liberté de circulation fut restreinte par
l’introduction de zones à trafic limité et c’est à leurs dépens
que s’implantèrent les systèmes de transport publics de
proximité alors en pleine expansion.
Hors des villes également, les communes et les
administrations commencèrent à intégrer les exigences
de la protection antibruit dès le stade de la planification
des routes. On peut dater de 1965 la toute première étude
technico-acoustique relative au trafic routier. Il s’agissait
d’une route nationale existante qui devait être aménagée
pour rejoindre l’autoroute. L’étude avait pour objectif de
mettre au point les techniques de métrologie acoustique
nécessaires à un premier état des lieux. Il fallait ensuite
pouvoir évaluer la nuisance sonore à laquelle s’attendre
une fois l’aménagement terminé et proposer des solutions
de réduction du bruit appropriées.
On ne disposait à l’époque d’aucune méthode reconnue
pour calculer la propagation du son, ni de valeurs limites
s’appliquant au bruit du trafic, ni même de valeurs de
référence pour l’évaluer. A l’instar d’autres situations
analogues, la démarche adoptée fut la suivante : s’appuyer
sur les lois de la physique et l’état de l’art, utiliser comme
point de départ les valeurs de référence de documents
validés (tels que la norme VDI 2058) et en déduire celles
qui s’appliqueraient au cas considéré. Du reste, les valeurs
utilisées dans le cadre de ce travail ont été reprises
ultérieurement dans la norme
DIN 18005 : Protection
antibruit en milieu urbain
.
Cette démarche conduisit finalement à la toute première
cartographie des nuisances sonores. C’est sur la base
des cartes ainsi établies et des critères retenus que les
premières solutions furent mises au point : la construction
de murs de protection acoustique, qui furent même
complétés ultérieurement par des souterrains fermés.
Précisons pour mémoire qu’à l’époque, la construction
d’un mur de protection acoustique était beaucoup plus
facile à financer si on la présentait comme une mesure
d’esthétique paysagère plutôt que comme une mesure de
protection antibruit.
Sur un plan technique, les mesures de protection définies
dans ce contexte sont restées – avec les fenêtres
insonorisantes – l’instrument essentiel de réduction des
nuisances sonores dues au trafic. Les modifications
acoustiques se sont concentrées sur les revêtements
absorbants et sur une conception optimale du bandeau
déflecteur des murs et plus particulièrement de son
impédance ([32]). En Allemagne, les grandes voies de
circulation sont aujourd’hui équipées de murs de protection
acoustique sur une longueur de 1739 km et d’autres
types de barrières acoustiques (levées de terre) sur 906
km. En 2000, la progression enregistrée a porté sur 58
km de parois et environ 18 km de murs de protection
acoustique.
En 1975, on parvint à uniformiser la réglementation
relative à la propagation du son à proximité des voies de
circulation et au calcul des émissions sonores routières
grâce à des directives provisoires sur la protection
acoustique à la périphérie des routes (RLS) qui furent
ensuite complétées et révisées en 1981 puis 1990 (RLS
90). Les valeurs d’immission dont cette réglementation
ne faisait pas encore état furent précisées en 1990
également dans une directive d’application complétant la
loi fédérale sur la protection contre les émissions
Bundes-
Immissionsschutzgesetz
; elles étaient définies comme
valeurs limites d’immission constatées en avant de la
fenêtre et s’appliquaient à la construction de nouvelles
voies ou à l’aménagement des voies existantes s’il
s’agissait d’une modification de grande ampleur. Même si
l’application de ces valeurs limites eut pour conséquence
des travaux de protection acoustique - et des dépenses
Fig. 7 : Première carte du bruit établie à partir d’un calcul
prévisionnel de la propagation du son sur des
terrains accidentés avec les émissions sonores d’une
autoroute et en tenant compte des distances et du
relief. Les différences de niveau constatées ici se
réfèrent au niveau moyen à 25 m de l’autoroute
Fig. 8 : Premier mur antibruit d’une route
nationale transformée en autoroute
100 ans d’ingénierie acoustique allemande appliquée aux techniques de réduction du bruit