Echo Bruit
n° 129
06.2010
g
Dossier :
Colloque “Zones calmes”
19
le magazine de l’environnement sonore
Le bruit est un sujet qui est souvent négligé dans les politiques
publiques. Nous nous faisons à l’idée, comme à une sorte de
fatalité, que dans nos villes, nous subissions le bruit de façon
quotidienne.
Nous le supportons tant bien que mal, heure par heure, minute
par minute, comme, par exemple, à proximité du boulevard
périphérique pour prendre le cas de Paris. Cependant, pour
certains, il s’agit d’une nuisance insupportable. Qui plus est,
ce sont ceux qui n’ont pas les moyens de se loger ailleurs
qui en sont les premières victimes et donc qui, quelque part,
subissent une double peine. Si nous pensons au boulevard
périphérique, au bruit s’ajoute la pollution atmosphérique ce
qui rend la vie des riverains particulièrement pénible. Tout cela
se traduit par des conséquences sanitaires : population sous
anxiolytique, retard scolaire pour les enfants…
La collectivité doit se préoccuper de cette nuisance qu’est le
bruit. Nous avons une responsabilité reconnue par les textes
pour élaborer des documents, pour mettre en œuvre des
plans, mais une partie des compétences nous échappe.
Quand nous agissons sur des voies qui sont de la compétence
de la Ville de Paris, comme le boulevard Magenta par
exemple, sur lequel le bruit a été divisé par deux suite aux
aménagements que nous avons mis en place, ou sur le
boulevard des Maréchaux grâce au tramway, ou bien encore
sur un certain nombre de quartiers, là, oui, nous sommes
compétents. Par contre, quand il s’agit de travailler sur le
boulevard périphérique ou sur des infrastructures ferroviaires,
nous sommes responsables pour élaborer des plans, respecter
les directives européennes et les textes législatifs, mais, au
moment de la mise en œuvre, nous sommes souvent face à
un Etat ou à des entreprises publiques qui considèrent que
la collectivité locale peut élaborer ces plans, mais qu’ils en
feront ce qu’ils voudront.
Nous devons mener une lutte d’un point de vue juridique, mais
aussi politique, c’est-à-dire de pression, pour faire entendre
un intérêt collectif et trouver les bons compromis avec d’autres
intérêts qui peuvent également être légitimes. Par exemple,
en prenant toujours le boulevard périphérique pour exemple,
nous avons une préoccupation partagée par le Conseil de
Paris, qui a voté début février un vœu pour réduire la vitesse
sur cette infrastructure. Bruitparif a rendu un rapport mettant
en évidence que les nuisances sonores sont au-delà des seuils
acceptables et préconise que la vitesse la nuit soit régulée
de manière différente. Même si c’est la Préfecture de Police
qui est décisionnaire concernant les vitesses en vigueur, nous
avons décidé, dans le cadre du Plan de Prévention du Bruit
dans l’Environnement, de prendre ce sujet à bras le corps.
Nous élaborons des compromis entre les usages de la ville
qui sont souvent un peu contradictoires. Il en va ainsi du
respect les déplacements mais également du droit au calme.
Il faut donc agir avec un peu d’intelligence et pas simplement
appliquer partout, de façon homogène, la réglementation.
Avec ce concept de zones de calme, nous abordons une idée
nouvelle qui génère de nombreuses questions. En effet, nous
ne savons pas vraiment de quoi nous parlons. Il est assez
facile de déterminer une zone de non calme, en revanche,
comment définir précisément ce qu’est une zone calme ?
• Les jardins publics ou les bois de Paris -bien qu’ils soient
traversés par des flux autoroutiers- peuvent-ils être considérés
comme calmes ?
• Qu’est-ce qu’une zone calme en devenir ?
• Quels sont nos souhaits en matière de zones calmes ?
• A partir de quand un quartier pourra-t-il être labellisé « zone
calme » ?
• Existe-t-il des outils uniques pour identifier les zones calmes
ou au contraire, une pluralité de méthodes ?
• Les critères à prendre en compte sont-ils seulement
acoustiques ?…
Nous souhaitons donc partager ces questions afin de parvenir
dans l’élaboration de notre plan au niveau de la Ville de
Paris à une concrétisation qui aille au-delà de ce que nous
avons déjà réalisé à ce jour (un plan de lutte contre le bruit
et une cartographie du bruit routier) et franchir des étapes
supplémentaires -même si nous ne savons pas encore si nous
aurons les compétences pour les mettre en œuvre.
Nous voulons faire progresser cette problématique qui nous
tient à cœur car elle véhicule des valeurs positives. Nous
ne pouvons pas continuer à nous satisfaire d’une ville dans
laquelle pour que certains puissent aller très vite d’autres
doivent subir quotidiennement des nuisances notamment
sonores.
n
Allocution d’ouverture
Denis BAUPIN, Adjoint au Maire de Paris,
chargé du développement durable, de l’environnement et du plan climat