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La clarinette cuivre-t-elle ?
Les fonctions de transfert en amplitude de la pression rayon-
née P
ray
sur la pression dans le bec P
bec
ont été évaluées.
Ces fonctions de transfert ne sont pas indépendantes de
la pression dans la bouche, et cela est particulièrement
significatif sur les fonctions de transfert associées aux
premiers harmoniques pairs (voir figure 2). Ainsi une varia-
tion de l’ordre de 20 à 40 % est observée. La très faible
variation (0,3 %) de la fréquence de jeu sur la plage de
pression d’alimentation étudiée permet d’expliquer partiel-
lement (typiquement de l’ordre de 10 %) mais pas totale-
ment la variation observée sur les fonctions de transfert.
Nous en déduisons qu’il faut plutôt voir là la conséquence
du phénomène de propagation non-linéaire.
Fig. 2 : Fonctions de transfert P
ray
/P
bec
en fonction de
la pression dans la bouche P
bouche
en Pa.
Résultats pour les harmoniques pairs 2, 4, 6 et 8 (de gauche à droite
et de bas en haut sur la figure). Les fonctions de transfert sont norma-
lisées par leur valeur au premier échantillon (P
bouche
= 10500 Pa)
Pertinence de la prise en compte de la
propagation non-linéaire
Principe de l’analyse
À partir d’un outil de simulation basé sur une approche
spectrale, il est possible d’estimer la contribution relative
du phénomène de propagation non-linéaire dans le son
rayonné (voir les références [5, 6] pour le principe détaillé
de la méthode s’appuyant sur des équations de Burgers
généralisées). Il suffit pour cela d’effectuer deux fois la
simulation, avec et sans prise en compte des termes de
propagation non-linéaire, puis de comparer les résultats
P
NL
et P
LIN
à la pression rayonnée mesurée P
ray
. Si les
résultats des deux simulations sont identiques, alors on
pourra conclure qu’il n’y a pas d’effet de propagation non-
linéaire. Dans le cas contraire, la propagation non-linéaire
opère de façon significative à l’intérieur du guide d’onde, et
cet effet devra être pris en compte dans une modélisation
réaliste du champ sonore rayonné par l’instrument.
Clarinette et bouche artificielle
Le cas de figure présenté ci-après concerne une des
situations présentées page précédente. Il s’agit de la
situation correspondant au niveau sonore le plus élevé
de la série, note correspondant à la pression d’alimen-
tation de 150 hPa. Rappelons que l’instrument est joué
«embouchure relâchée» sur son premier régime (143 Hz).
Les résultats des simulations linéaire P
LIN
et non-linéaire
P
NL
correspondant à ce cas de figure sont comparés à la
pression rayonnée mesurée (voir figure 3). Si on observe
les enveloppes spectrales, un écart significatif apparaît
entre les deux simulations. L’écart est déjà observable à
basses fréquences lorsque l’approximation ondes planes
est encore valide. Ceci confirme l’hypothèse évoquée en
fin de section précédente : les effets de la propagation
non-linéaire ne peuvent être négligés ici.
Fig. 3 : Enveloppe spectrale de la pression rayonnée en
fonction de la fréquence en Hz (bouche artificielle).
Les trois cas de figure : (- - - - ), pression rayonnée estimée par simu-
lation linéaire P
LIN
, (_ _ _) pression rayonnée estimée par simulation
non-linéaire P
NL
, (
) pression rayonnée mesurée P
ray
.
Les spectres mesuré et simulé sous l’hypothèse de propaga-
tion non-linéaire, exhibent des différences non négligeables.
Ceci illustre les limites du modèle physique simplifié, voire
simpliste, en arrière-plan des simulations [5, 6]. Néanmoins
ces différences sont plus faibles que les différences entre
les deux spectres simulés. Cette affirmation est confirmée
si nous observons les centres de gravité spectraux, CGS,
correspondants (voir figure 4) : la simulation du CGS avec
prise en compte de la propagation non-linéaire illustre assez
bien l’évolution, en fonction de P
bouche
, du CGS associé à
la pression rayonnée P
ray
mesurée. La simulation linéaire
n’offre pas une telle adéquation avec la mesure.
Fig. 4 : Rapport des CGS de la pression rayonnée et de la
pression mesurée dans le bec (P
bec
), en fonction
de la surpression dans la bouche (P
bouche
).
Les trois cas de figure : (- - - - ), pression rayonnée estimée par simu-
lation linéaire P
LIN
, (_ _ _) pression rayonnée estimée par simulation
non-linéaire P
NL
, (
) pression rayonnée mesurée P
ray
.