Page 58 - base

Version HTML de base

58
a physique des instruments de musique à vent repose
en grande partie sur la modélisation du champ acoustique
intérieur à l’instrument considéré comme guide d’onde [1].
L’hypothèse de la propagation acoustique guidée linéaire
est justifiée dans la plupart des cas de figure rencontrés
en situation de jeu musical. Un contre-exemple spectacu-
laire maintenant bien connu [2] est le cas des sons cuivrés
obtenus par les trompettistes et autres trombonistes jouant
à une nuance fortissimo. Ces sons, si caractéristiques,
ne peuvent être obtenus avec des instruments à anche.
Une étude préliminaire [3] n’a pas montré d’effets non-li-
néaires significatifs. Néanmoins un nombre relativement
réduit de situations avait été investigué dans cette étude.
L’objectif du présent travail est d’apporter de nouveaux
éléments de réponse à cette question en explorant de
nouvelles configurations.
Les premières expériences reposent sur l’utilisation d’une
bouche artificielle et d’une clarinette simplifiée jouée à
des nuances anormalement élevées (chapitre 2). Après
avoir mis en évidence des effets de propagation non-li-
néaire, les résultats expérimentaux sont discutés plus en
détail par comparaison avec les résultats de simulation au
chapitre 3. Par ailleurs quelques sons joués par un clari-
nettiste sont également analysés, et des effets de propa-
gation mis en évidence.
Résultats expérimentaux préliminaires
Dispositif expérimental
Une clarinette simplifiée, les corps du haut et du bas étant
remplacés par un tube parfaitement cylindrique, est jouée
par une bouche artificielle (voir figure 1) ou par un clari-
nettiste, l’ensemble étant installé en chambre sourde. La
surpression statique P
bouche
dans la bouche est mesurée
via un capteur piézo-électrique. La pression acoustique est
mesurée en différents points à l’intérieur de l’instrument, et
à l’extérieur. Nous ne retiendrons ici que la pression acous-
tique P
bec
mesurée dans le bec à l’aide d’un microphone
de type piézo-résistif de faible sensibilité (12.10
-5
 V/Pa),
et la pression acoustique rayonnée P
ray
mesurée dans l’axe
de l’instrument à une distance d’un mètre du pavillon, avec
un microphone de mesure capacitif.
Fig. 1 : Photographie du dispositif expérimental
en chambre sourde
L’instrument est joué à très fort niveau sonore, et seul des
régimes permanents périodiques sont étudiés. L’analyse
des signaux est faite dans le domaine fréquentiel, où les
amplitudes complexes des harmoniques sont estimées
par détection synchrone.
Fonctions de transfert et comportement non-linéaire
Une façon classique d’appréhender le comportement
linéaire (ou non) d’un système physique est d’observer la
constance (ou non) de fonctions de transfert lorsque la
source est d’amplitude variable [4].
Une première série de 10 mesures est discutée ci-après.
Elle correspond à l’instrument joué «embouchure relâ-
chée» sur son premier régime (lèvre inférieure appuyée
sans pression sur l’anche ; 143 Hz) avec une pression d’ali-
mentation variant de 105 à 150 hPa par pas de 5 hPa.
La clarinette cuivre-t-elle ?
Pertinence de la prise en compte des phénomènes de propa-
gation non-linéaire pour la modélisation de la clarinette
Joël Gilbert, Lanig Libouban,
Jean-Pierre Dalmont
Laboratoire d’Acoustique de
l’Université du Maine
UMR CNRS 6613
Avenue Olivier Messiaen
72085 Le Mans CEDEX 9,
E-mail : joel.gilbert@univ- lemans.fr
Résumé
L’objectif de l’étude est d’étudier la pertinence ou non de la prise en compte des effets
de propagation non-linéaire dans la modélisation physique de la clarinette. Si des effets
spectaculaires liés à la propagation non-linéaire se manifestent lorsque les cuivres sont
joués à fort niveau (cas des «sons cuivrés»), il n’en est rien, a priori, pour les instruments
à anche. Néanmoins il n’est pas pour autant exclu que, dans certaines conditions, des
effets significatifs puissent être observés. Dans un premier temps, des expériences
ont été réalisées à l’aide d’une bouche artificielle et d’une clarinette simplifiée. Dans
certains cas de figure, les effets de propagation non-linéaires sont suffisamment
significatifs pour être pris en considération. Ces résultats ont cependant été obtenus
pour des configurations peu réalistes. C’est pourquoi dans un second temps des
mesures ont été effectuées sur une vraie clarinette jouée par un musicien. Si les niveaux
sonores en entrée de tube n’atteignent pas ceux obtenus avec la bouche artificielle, des
effets de propagation non-linéaires significatifs ont toutefois pu être observés.
L