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Perception sonore de la variabilité de positionnement d’un casque audio
Fig. 4 : Taux de détection (moyennes et intervalles de
confiance à 95%) de la séquence unique par les sujets,
en fonction du casque (tous extraits confondus)
Effet de l’extrait
Le test statistique comparant la valeur nominale 33,33%
à la distribution des réponses des sujets a indiqué que
pour chacun des extraits considérés et tous casques
confondus, les sujets avaient significativement détecté les
séquences uniques, et donc perçu la variabilité de posi-
tionnement des casques (p<0,0001, figure 5).
Par ailleurs, l’ANOVA a permis d’observer un effet signi-
ficatif de l’extrait (F(2,108)=60,603, p<0,0001), et le
post-hoc LSD de Fisher (comparaison des extraits deux
à deux) a indiqué que les extraits musicaux étaient signi-
ficativement différents du bruit rose (p<0,0001), et quasi-
ment significativement différents l’un de l’autre (p=0,056).
Ainsi, l’audibilité de la variabilité de positionnement a
été largement plus facile avec le bruit rose qu’avec les
extraits musicaux.
Fig. 5 : Taux de détection (moyennes et intervalles de
confiance à 95%) de la séquence unique par les sujets,
en fonction de l’extrait (tous casques confondus)
Discussion
Le principal résultat de cette étude est la confirmation
de l’audibilité de la variabilité de positionnement d’un
casque. Même si les taux de détection de la séquence
unique (présentée une seule fois dans le trio) varient
d’un casque à l’autre et d’un extrait à l’autre, ceux-ci
sont toujours significativement et largement supérieurs
à la chance. Comme le laissaient prévoir les mesures
réalisées dans les études passées [2,3,5], déposer un
casque et le replacer modifie –d’un point de vue objec-
tif mais aussi perceptif- le signal. Le lissage fréquentiel
effectué par les filtres cochléaires [4] ne semble donc
pas suffire à gommer les différences induites par les
repositionnements successifs.
Dans cette étude, les signaux issus des casques ont été
enregistrés sur une tête artificielle, et les casques ont
donc été manipulés par les expérimentateurs. Il est possi-
ble que les repositionnements successifs des casques
aient été plus répétables si des sujets ont eux-mêmes
effectué cette opération sur leurs propres oreilles [13].
Néanmoins la significativité des résultats et l’audibilité
évidente des repositionnements de casques sur la tête
artificielle laissent penser que même si l’expérience avait
été menée avec des auditeurs-manipulateurs, l’audibilité
des repositionnements successifs aurait été conservée.
De plus, McAnally et Martin [4] ont indiqué que la varia-
bilité de HPTF mesurées sur des oreilles humaines était
très proche de la variabilité de HPTF mesurées sur des
têtes artificielles (variabilité supérieure d’environ 1 dB
pour les fréquences inférieures à 500 Hz avec une tête
artificielle).
Le fait que les différences induites par les position-
nements successifs des casques soient perceptibles
ne signifie pas qu’une compensation soit indispen-
sable. Concernant la synthèse/restitution binaurale,
des études ont montré qu’après le filtrage effectué
par l ’oreille interne, l ’importance des pics des HRTF
(nécessaires à la synthèse binaurale) était comme la
variabilité des HPTF était secondaire [4]. Concernant
les travaux des ingénieurs du son, il est probable que
les choix de microphones, d’égalisation, de traitement,
etc… entraînent des modifications du signal au moins
aussi grandes que celles qui sont engendrées par les
différences de positions de casques.
Le fait que différentes positions de casque engendrent
des sons restitués différents (physiquement et percepti-
vement) est d’ailleurs un problème difficile à résoudre :
une compensation en temps réel d’un casque et de sa
position signifierait aussi une mesure en temps réel de
sa réponse in situ (dans les oreilles de l’auditeur). Cette
mesure ne pourrait être possible qu’avec une sonde
puisqu’il ne serait pas possible de bloquer le conduit en
conditions réelles d’utilisation. Or les mesures avec sonde
sont difficiles à mettre en œuvre : difficulté de positionne-
ment précis de la sonde, calibration de la sonde au prix
d’une égalisation radicale et potentiellement dégradante
pour le signal, microphones en bout de sonde non adap-
tés aux mesures large bande etc… D’ailleurs les princi-
pales utilisations d’une sonde ont été menées avec des
prototypes non commercialisés [9].