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Évaluation empirique en régime impulsionnel de divers bouchons d’oreille passifs à atténuation dépendante du niveau de bruit
de Gunfender par la société Racal Safety. D’autres réalisa-
tions passives sont apparues au cours des années suivan-
tes comme la valve bien connue « Lee Sonic Ear Valvs »
(qui est devenue « North Sonic Ear Valvs
® 
» en différentes
versions) et le filtre « Aural Technology Protectear™ » plus
connu récemment sous le nom de « Hocks Noise Braker ».
Dans les années 1990, à l’Institut franco-allemand de
recherches de Saint Louis (ISL), un travail a commencé
sur l’étude du comportement d’orifices non- linéaires.
Cette étude a conduit à un filtre optimisé spécialement
pour les bruits d’armes. Il a été inséré dans le bouchon
d’oreille « Combat Arms Earplug » et dans d’autres versions
détaillées plus loin dans cet article.
Différents systèmes contenant des valves ont été employés
ces dernières années et plus récemment des diaphrag-
mes qui sont censés réagir à des sons de très fort niveau,
procurant ainsi, par obturation, une augmentation de la
protection. Bien que ces réalisations semblent procurer
une mesure de la dépendance au niveau de bruit, aucune
donnée concernant ces systèmes n’est disponible dans
la littérature qui suggère qu’une valve bouge suffisam-
ment pour obturer efficacement un orifice. Le système
« Protectear/Noise Braker » est un tube présentant une
discontinuité de sections qui a la prétention d’utiliser le
« principe de la décroissance accélérée de la résonance »
qui empêcherait les sons de plus de 80 dB de passer à
travers ce filtre [4]. Une revendication aussi extravagante
n’a jamais été proprement documentée et est en désac-
cord avec les explications théoriques classiques de la
dépendance au niveau de bruit due à la non-linéarité de
petits orifices [5,6].
Malgré un grand intérêt pour les bouchons d’oreille passifs
à atténuation dépendant du niveau de bruit et de fortes
revendications faites par certains fabricants concernant
leurs performances, peu de données sont disponibles
dans la littérature. Ceci est probablement dû en partie à
la difficulté de mesurer les performances de ces produits
pour les forts niveaux de bruit. Une ancienne étude utili-
sant des cadavres comme système de tests acoustiques,
dans le but de réaliser des mesures objectives, a démon-
tré la dépendance du niveau pour l’atténuation apportée
par les produits Gunfender et Lee Sonic [7]. Les résultats
de plusieurs études utilisant des sujets humains exposés à
des tirs d’armes et des explosions ont également été repor-
tées dans la littérature et démontrent la capacité à proté-
ger de bouchons d’oreille et casques perforés supposés
dépendant du niveau de bruit pour de telles sources sonores
[8-10]. Cependant, nous ne connaissons aucune étude ayant
examiné et analysé l’atténuation mesurée avec une grande
variété de protecteurs auditifs prétendus dépendant du
niveau de bruit pour des niveaux de bruits atteignant 190
dBP SPL, et cela justifie le besoin de cette étude.
Atténuation passive dépendante du niveau –
Éléments théoriques
La dépendance au niveau de bruit dans les protecteurs
auditifs passifs peut se traduire, soit par une augmenta-
tion, soit par une diminution de l’atténuation avec l’aug-
mentation du niveau. Il est clair que la première solution
est préférable, mais la seconde peut être observée quand,
par exemple, une explosion est suffisamment intense pour
que le mouvement induit dans le bouchon ou le serre-tête
provoque une fuite acoustique momentanée ou perma-
nente. D’un autre côté, il a été démontré théoriquement
et empiriquement qu’un protecteur auditif avec des petits
orifices permet d’augmenter l’atténuation.
L’atténuation d’un petit orifice peut être comparée à un
élément résistif qui est le rapport de la pression acousti-
que à la vitesse particulaire au sein de l’orifice. Aux faibles
niveaux de bruit, un écoulement laminaire prédomine et la
pression aux bornes de l’orifice est liée linéairement à la
vitesse particulaire. Par contre, à des niveaux d’excitation
suffisamment forts des processus turbulents entrent en jeu
et des anneaux tourbillonnaires (vortex ring) sont générés
à la sortie de l’orifice. Dans ce cas, la pression acoustique
devient proportionnelle au carré de la vitesse particulaire ce
qui se traduit par une augmentation de l’impédance acous-
tique de l’orifice et donc par une augmentation de l’atténua-
tion. Une analyse détaillée peut se trouver dans [6].
Ce qui peut paraître exceptionnel, c‘est le fait que, dans
de telles réalisations, la dépendance au niveau de bruit
est due à un orifice qui, aux faibles niveaux au-dessous
desquels sa sensibilité à l’amplitude devient apparente,
est en réalité une fuite acoustique qui dégrade l’atténua-
tion basique apportée par le protecteur.
Ainsi, l’augmentation d’atténuation liée à la dépendance
au niveau de bruit ne peut pas augmenter l’atténuation au-
dessus de celle du protecteur passif pour lequel on aurait
bouché l’orifice, mais sert plutôt à diminuer la perte d’at-
ténuation due à l’orifice aux faibles niveaux de bruits. La
dépendance au niveau de bruit ne devient apparente que
lorsque le niveau sonore augmente au-dessus d’un niveau
à partir duquel la turbulence se manifeste.
Le plus efficace des systèmes passifs avec un orifice
montre une apparition de la dépendance au niveau de bruit
autour de 110 à 115 dB SPL (niveau crête d’une impul-
sion)[6]. Une fois que la dépendance au niveau de bruit
est initiée, le taux maximal théorique d’augmentation est
de 0,5 dB par augmentation de 1 dB du niveau de bruit
au-dessus du niveau de transition critique.
Méthodes de mesure
Afin de référencer l’atténuation des différents protecteurs
auditifs à atténuation dépendante du bruit, ils ont été
évalués par le premier auteur avec la méthode standardi-
sée de la mesure au seuil de l’atténuation dans une oreille
réelle (REAT : Real Ear At Threshold). Comme ces mesures
sont effectuées à des niveaux relativement bas, entre 40
et 50 dB, correspondant aux niveaux de seuil auditif de
sujets entendant parfaitement, ces données représentent
l’atténuation à faible amplitude des protecteurs étudiés,
bien en dessous de la région de transition [11].
Les différentes méthodes utilisées pour la mesure de la
dépendance au niveau de bruit sont faites soit à partir d’un
microphone intégré dans l’oreille réelle (MIRE : Microphone
In Real Ear) soit à partir d’un système de test acoustique
artificiel (ATF) du type tête artificielle. L’ATF utilisé pour
cette étude a été implémenté par le second auteur [11].