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Spécial “ Electroacoustique ”
Acoustique
&
Techniques n° 52
L’approche scientifique appliquée à la prise de son
exceptionnelle en utilisant un unique array. Sinon, il faut faire
appel à des micros d’appoint placés, soit individuellement à
proximité des instruments, soit sur un groupe d’instruments.
Cette technique de «renforcement» nuit sensiblement à
la qualité de restitution d’un simple array, mais ceci peut
être évité en utilisant une technique [4] qui retarde ces
microphones d’appoint de telle sorte qu’ils se placent (dans
l’échelle du temps des réflexions acoustiques) dans le
premier groupe de réflexions (voir Figure 1). De cette façon,
l’intégrité du son de l’array principal est conservée.
C’est dans le développement de systèmes de prise de son
de type array que j’ai travaillé depuis maintenant presque 25
ans. Ce travail de recherche et développement pourrait être
considéré comme un exemple de démarche pour prendre en
compte simultanément les caractéristiques physiques des
microphones, les propriétés psycho-acoustiques de l’écoute
stéréophonique ou multicanal, et les objectifs d’un preneur
de son. Les mesures psycho-acoustiques concernent surtout
l’analyse des caractéristiques de localisation stéréophonique
et multicanal ; les aspects physiques concernent les
mesures de directivité des différents microphones et leur
modélisation mathématique. Le preneur de son a en effet
besoin d’un outil de prise de son ayant des caractéristiques
ajustables et bien documentées, de telle sorte qu’il puisse
choisir une configuration optimale dans un contexte de
prise de son donné.
Le reste de cet article sera ainsi consacré à la description
de cette approche connue en anglais sous l’acronyme de
MMAD : Multichannel Microphone Array Design.
Les mesures psycho-acoustiques
Commençons par les caractéristiques de l’écoute
stéréophonique dans le contexte de la configuration
de l’écoute normalisée (en triangle équilatéral). On doit
essayer d’estimer des valeurs de «différence de niveau»
(ou «différence d’intensité») et de «différence de temps»
entre les deux canaux de la stéréophonie, ces différences
étant nécessaires pour obtenir la localisation d’une source
sonore à une position donnée. Pour que ces mesures soient
directement applicables à un système de prise de son, la
captation de signaux d’origine acoustique doit se faire à
l’aide de microphones de studio de qualité professionnelle,
et avec des sources sonores naturelles. Le résultat de
ces mesures est sensiblement différent des résultats de
laboratoire utilisant des artifices électroniques pour créer
les différences de niveau et de temps, et des sources
sonores artificielles telles que bruit blanc (ou rose) en
bande large ou étroite. La captation d’une source sonore
par des microphones prend naturellement en compte la
largeur acoustique intrinsèque de celle-ci, et intègre les
caractéristiques inhérentes aux
microphones.
Enfin, une source sonore naturelle
satisfait le sens de l’auditeur
pour la reconnaissance, semble-
t-il nécessaire, de celle-ci (une
fonction dite «cognitive»). Des
caractéristiques de mesure
p s y c h o - a c o u s t i q u e s ( o u
perceptives) ont été réunies dans
la série de mesures fait par Gert
Simonsen [5] en 1985 dans le
laboratoire de psycho-acoustique
de l’Université technique de Lyngby
au Danemark. Ces mesures
ont donné des informations de
localisation - pas seulement
vers les extrémités du champ
de restitution (les enceintes
acoustiques), mais aussi à des
points intermédiaires (à 10° et 20°) par rapport au centre
du champ de restitution stéréophonique.
Un modèle mathématique de directivité
La deuxième étape consiste à utiliser un modèle
mathématique simple pour les différentes directivités des
microphones, et à vérifier que celui-ci correspond bien à
la réalité, ou au moins pour les segments de directivité
utilisés pour la prise de son stéréo - dans la limite de la
bande passante perçue par l’oreille :
directivité = A + B . cos(
α
)
Fig. 1 : Le son direct, les premières réflexions et le son réverbéré
Fig. 2 : Coordonnés de localisation de Simonsen