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Spécial “ Electroacoustique ”
43
Acoustique
&
Techniques n° 52
Le son 3D dans toutes ses dimensions
a vidéo 3D est annoncée comme la prochaine évolution
du monde de l’image après la Haute Définition (HD). Qu’en
est-il pour le son? En fait, sans que nous en soyons
véritablement conscients, nous sommes déjà plongés dans
l’ère du son 3D. Aujourd’hui le son multicanal 5.1 a envahi
les salles de cinéma et nos salons. Le son 3D est aussi
présent dans les jeux 3D interactifs sur PC ou consoles.
Mais ce n’est là qu’un petit échantillon de ce que le son
3D peut nous offrir aujourd’hui et de ce qu’il nous réserve
pour l’avenir…
Dans notre expérience naturelle d’écoute, nous percevons
le monde sonore en 3D, c’est-à-dire que nous sommes
capables d’identifier la position des sons à la fois en
distance, en azimut et en élévation. Ce qui nous permet de
localiser les sons, c’est d’abord le fait que nous avons deux
oreilles ; les différences entre les sons captés au niveau des
tympans gauche et droit renseignent le système auditif sur
l’azimut de la scène sonore. Ces différences interaurales
portent sur le temps d’arrivée (ITD pour Interaural Time
Difference) et sur l’intensité des sons (ILD pour Interaural
Level Difference). ITD et ILD sont les indices majeurs de
la localisation dans le plan horizontal. Le second organe
déterminant pour la localisation des sons est le pavillon
de l’oreille ; par un jeu de résonances et de diffractions, le
pavillon contribue à modifier le timbre des sons en fonction
de leur direction d’incidence. Ces indices spectraux sont
exploités par le système auditif pour identifier l’élévation
de la source sonore. D’autres éléments morphologiques
(réflexions sur le torse et les épaules) viennent aussi
compléter le rôle du pavillon.
Les technologies du son 3D visent à créer l’illusion de cette
perception en 3D. Mais, en ajoutant une nouvelle dimension
à la restitution du son, le son 3D permet surtout d’introduire
une vraie rupture dans les applications audio. Par exemple,
dans le domaine des télécommunications, il permet d’enrichir
les services de communication de groupe. La flexibilité
intrinsèque de la VoIP permet d’envisager la généralisation
de communications interpersonnelles enrichies par la
dimension spatiale. Des services professionnels comme
la conférence audio ou la visioconférence pourront ainsi
profiter de l’intelligibilité, du naturel et du confort apportés
par un rendu sonore spatialisé des locuteurs. L’étape
suivante est la «téléportation sonore» c’est-à-dire capter
la scène sonore de façon si fidèle qu’une fois restituée,
les auditeurs ont l’illusion d’être transportés sur les lieux
de la prise de son. C’est la possibilité de faire partager à
des amis distants des événements tels qu’un concert ou
une fête de famille. Les techniques de captation audio 3D
qui permettent cette immersion sonore 3D existent déjà ;
il s’agit par exemple de la prise de son binaurale avec une
tête artificielle. Les futures interfaces misent aussi sur le son
3D : avec la dimension spatiale sonore on peut construire un
écran sonore qui vient compléter l’écran visuel en exploitant
une structure spatiale similaire. C’est aussi une piste pour
développer des interfaces dédiées aux aveugles.
Les technologies audio 3D sont-elles aujourd’hui à la hauteur
de ces futurs enjeux ? Certes, le monde du son 3D est
riche de technologies : stéréophonie, multicanal, binaural,
holophonie (Wave Field Synthesis ou WFS), Ambisonics
(Higher Order Ambisonics ou HOA), etc. Cette variété
est d’abord un atout ; aucune technologie n’est idéale en
soi, chaque technologie présente des avantages et des
inconvénients dont on peut jouer pour définir la solution
la mieux adaptée à un contexte donné d’application. Mais
la pluralité des technologies audio 3D est aussi un frein,
dans la mesure où elle contribue à multiplier les formats de
contenus. Les créateurs (ingénieurs du son), les distributeurs
(radio, télévision, cinéma, internet) et le grand public sont
facilement noyés dans cette diversité. La principale difficulté
réside dans le fait qu’un format de contenu est dédié en
général à un système d’écoute spécifique : système
stéréophonique, système 5.1, casque… Si l’on veut
pouvoir accéder à tous les contenus proposés, il faudrait
multiplier les systèmes d’écoute. Un enjeu fort pour le
domaine de l’audio 3D est donc la conversion de formats
afin de pouvoir adapter les contenus à la configuration
d’écoute disponible. Ici le terme contenu est vu au sens
large. Il englobe aussi bien la musique, les films, les jeux,
R. Nicol, J. Daniel, M. Emerit, G. Pallone, D. Virette, N. Chetry, P. Guillon, S. Bertet
France Telecom R&D Orange Labs
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