Spécial “ Acoustique sous-marine ”
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Acoustique
&
Techniques n° 48
Nous avons utilisé une source sonore,
S, harmonique
en temps (mode continu) émettant à une fréquence de
114 kHz. Au niveau de la source, la hauteur d’eau, H, est
de 34,5 mm (± 0,5 mm). Il est à noter que la profondeur du
canal de transmission est très sensible à l’évaporation de
l’eau qui peut atteindre l’ordre du mm par jour. Il faut donc,
soit mesurer cette profondeur en début d’expérience, soit
estimer l’évaporation par rapport à l’instant où l’on a fait la
mesure et tenir compte de ce paramètre pour donner la
profondeur du canal. Dans le dispositif expérimental, source
et récepteur peuvent être déplacés suivant les trois axes (Ox),
(Oy) et (Oz) (voir la Fig. 4). Nous avons positionné la source
et le récepteur à la même immersion (10 mm) et déplacé
le récepteur entre 0 et 5 m (avec un incrément de 1 cm)
dans l’axe (Ox) pour effectuer les mesures de perte par
propagation. Des absorbeurs acoustiques ont été répartis de
nouveau sur les bords de la cuve pour diminuer les réflexions
parasites sur les parois latérales. Toutefois, contrairement au
cas du fond plat, seule une des deux parois latérales a dû être
équipée d’absorbeurs, du fait de la présence d’une « plage »
à proximité de l’autre paroi. Les mesures expérimentales de
perte en transmission en fonction de la distance émetteur-
récepteur, sont représentées sur la Fig. 5.
L’observation de la courbe obtenue permet de constater qu’il
existe un système complexe d’interférences entre modes,
et surtout qu’au-delà d’une distance de 3,5 m, il n’y a plus
d’énergie transmise au récepteur, ce qui est une manifestation
claire de la présence d’effets 3D.
Des simulations numériques avec le code de calcul 3DWAPE
ont été effectuées en considérant avec un facteur d’échelles
de 1000, les mêmes conditions que pour l’expérience, c’est-à-
dire que l’on considère une source émettant à une fréquence de
114 Hz et un domaine constitué d’une couche d’eau homogène
(de densité 1 g/cm
3
, de célérité 1499,58 m/s et d’épaisseur
H = 34,5 m au niveau de la source et du récepteur) et d’une
couche sédimentaire semi-infinie en immersion, homogène (de
densité 1,99 g/cm
3
et de célérité 1740 m/s) et atténuante
(avec un coefficient d’atténuation égal à 0,5 dB par longueur
d’onde). De telles valeurs conduisent à l’existence de 3 modes
propagatifs dans le guide d’onde correspondant à l’épaisseur
H = 34,5 m. Les immersions de la source et du récepteur
utilisées dans le code sont, au facteur d’échelles considéré
près, identiques à celles données par l’expérience.
Nous représentons sur la Fig. 6, les coupes horizontales
(immersion : 10 m) des champs de perte par propagation
correspondant à un calcul N×2D et à un calcul 3D. Nous
pouvons observer sur la solution 3D une déviation relativement
importante de l’énergie en travers de la pente (c’est-à-dire dans
l’axe (Ox) de la cuve) et loin de la source. Une telle déviation
des ondes acoustiques résulte des multiples interactions
(au cours de la propagation) des ondes acoustiques avec
le fond incliné. De toute évidence, la solution N×2D ne fait
pas apparaître une telle déviation. Comme
nous l’avons déjà mentionné, un calcul N×2D
consiste en une simple répétition d’un calcul
bidimensionnel pour plusieurs plans verticaux
adjacents (et centrés sur la source). Il permet
ainsi la reconstruction d’un champ acoustique
en trois dimensions, donnant par là même,
l’illusion qu’un authentique (et plus complexe)
calcul 3D a été effectué. En revanche, il ne
prend nullement en compte les termes de
couplage suivant la direction horizontale
transverse à chacun des plans verticaux
considérés.
Par conséquent, un calcul N×2D ne peut
permettre à une onde acoustique de sortir
d’un plan vertical pour se propager dans un
plan vertical adjacent, processus à l’origine
du phénomène de déviation horizontale des
ondes acoustiques. La déviation observée loin de la source
dans l’axe (Ox) est ainsi typiquement un effet 3D.
Fig. 4 : Dispositif expérimental utilisé pour mettre en évidence
la présence d’effets typiquement tridimensionnels.
Dans le plan vertical contenant la source sonore S et
le récepteur R, l’interface séparant la colonne d’eau du
fond sableux est horizontale, malgré la présence d’une
pente d’angle
α
= 4,5° dans la direction transverse.
Fig. 5 : Courbe de perte par propagation dans l’axe (Ox)
obtenue expérimentalement. Source et récepteur
sont positionnés à la même immersion (10 mm)
Fig. 6 : Champs de perte par propagation (coupe horizontale
à une immersion de 10 m) correspondant à un simple
calcul N×2D (à gauche) et à un calcul 3D (à droite).
La propagation océanique en eau peu profonde : modèles et expérimentations