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CFA - Tours 2006
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Acoustique
&
Techniques n° 45
Détection et localisation de microdégradation de matériaux par spectroscopie d’ondes élastiques non linéaires
La connexion directe entre les effets non linéaires et les
microdégradations dans les métaux et composites est
désormais établie sans aucun doute dans de nombreuses
configurations expérimentales. Parmi elles, on peut citer
comme sonde de dégradation, les mesures obtenues à
partir des méthodes de propagation non linéaires d’ondes
[4-5], de Spectroscopie de modulation non linéaire d’ondes
[6-8], de Spectroscopie de résonance acoustique non
linéaire monomode [9-11], de l’Analyse de réverbération
non linéaire [12-13], de la Dynamique lente [14-15], de
la Modulation de phase [16,17], de l’Autodémodulation
d’ondes [18], etc.
Les tests réalisés sur une large gamme de matériaux
soumis à des régimes de dégradations diverses d’origines
mécanique, chimique ou thermique, ont montré que la
sensibilité de ces méthodes non linéaires pour la détection
de phénomènes à l’échelle microscopique est nettement
supérieure à celle obtenue avec les méthodes acoustiques
linéaires [20-22].
Les sections ci-après contiennent une sélection de trois
exemples de techniques NEWS appliquées au CND de
matériaux solides. La suite sera ensuite consacrée à
l’apport de ces méthodes NEWS en terme de technique
d’imagerie.
Méthodes NEWS : exemples de réalisation
expérimentale
Spectroscopie de réverbération non linéaire
Le premier exemple concerne l’application de la
Spectroscopie de réverbération non linéaire (NRS pour
Nonlinear Reverberation Spectroscopy [12-13]) appliquée
à l’évaluation des dégradations de CFRP (Carbon
Fiber Reinforced Plastics), un matériau qui présente
actuellement un très grand intérêt dans l’industrie
aéronautique. La méthode NRS consiste à exciter
sinusoïdalement l’échantillon à une amplitude et une
fréquence constante durant une période suffisamment
longue. La fréquence est choisie proche d’une fréquence
de résonance propre de l’échantillon. En pratique, cette
excitation peut être réalisée sans contact à l’aide d’un
haut-parleur acoustique. Après un certain nombre de
cycles, nécessaire à l’échantillon pour qu’il atteigne son
état de résonance stationnaire, l’excitation sinusoïdale est
stoppée à t = t
0
, et la réponse réverbérante de l’échantillon
est mesurée et enregistrée de t
0
à t
1
.La réponse peut
également être enregistrée sans contact à l’aide d’une
sonde laser de type interférométrique ou vibrométrique.
Le signal de réverbération est typiquement un signal
d’amplitude décroissante au cours du temps, avec une
grande amplitude proche de t
0
, et une faible proche de t
1
.
Une synchronisation appropriée permet un moyennage du
signal, et un asservissement approprié s’avère très utile
pour augmenter la dynamique en fonction du temps de
mesure. Le signal décroissant est ensuite analysé sur une
petite fenêtre temporelle (20 cycles) par un ajustement
sur une sinusoïde d’amplitude exponentiellement
décroissante avec l’amplitude ; la constante de temps de
l’exponentielle, la fréquence et la phase étant choisies
comme paramètres d’ajustement.
Ceci permet de construire une représentation paramétrique
de la vraie fréquence de résonance en fonction de
l’amplitude, donnant ainsi la signature de la non-linéarité.
Si le matériau est linéaire, la fréquence de réverbération
reste constante quelle que soit la fenêtre temporelle.
Si le matériau est non linéaire, cette fréquence de
réverbération augmente significativement avec le temps,
ce qui correspond à une diminution d’amplitude.
La Figure 3 confirme clairement ce comportement pour
trois échantillons de CFPR : un échantillon de référence,
un échantillon traité thermiquement à 250° pendant
30 minutes, et un échantillon traité à 400° pendant 45
minutes. La caractéristique linéaire de la décroissance de
la fréquence en fonction de l’amplitude du déplacement
est parfaitement prédite par un modèle hystérétique dans
lequel la relation contrainte-déformation est non univoque.
La pente de déviation de fréquence peut être utilisée
comme une signature paramétrique de la non-linéarité.
La figure 3b illustre l’évolution de cette pente pour les
différentes températures et temps d’exposition. Une
comparaison avec des C-scan classiques confirme la très
bonne corrélation entre la non-linéarité et la présence de
délamination croissante (Figure 4).
Fig. 3 : Technique de Spectroscopie par réverbération non linéaire (NRS) appliquée à des échantillons de
CFPR endommagés thermiquement.
A : NRS analysé par fréquence de résonance pour un échantillon sain et des échantillons exposés
à 250° pendant 30 minutes et a 300° pendant 45 minutes, normalisés, pour chaque série, à la
fréquence de résonance linéaire (faible amplitude).
B : évolution de la signature du CFPRF en fonction de la température
(Ref-240-250-260-270-300°C) et du temps d’exposition (15-30-45-60’).