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Approfondissons…
Acoustique
&
Techniques n° 50
Des obstructions de contrôle pour lutter contre le bruit des ventilateurs axiaux
sillages saillants générés par de tels cylindres de contrôle ne
permettent pas de contrôler sélectivement une fréquence
présente dans le spectre acoustique du ventilateur sans
affecter les autres fréquences. Dans cet article, nous nous
intéressons donc à la conception d’obstructions capables
de contrôler une seule fréquence à la fois, sans affecter les
harmoniques d’ordres supérieurs.
Dans la première partie, les mécanismes de génération du
bruit de raie sont rappelés, puis le principe du contrôle et la
conception d’obstructions harmoniquement sélectives sont
exposés. Enfin, des résultats de contrôle d’une raie en champ
libre et de deux raies en conduit sont présentés.
Génération du bruit de raie des ventilateurs
Lorsque l’écoulement traversant un ventilateur est spatialement
non uniforme mais stationnaire, les angles d’attaques, et
donc les forces de portance, des différentes pales varient
périodiquement, constituant ainsi des sources acoustiques
efficaces (charge instationnaire).
Un rotor rayonne intensément à la fréquence de passage des
pales quand il interagit avec un écoulement non uniforme dont
la distribution circonférentielle possède autant de périodes
spatiales que le ventilateur a de pales (B). Dans ce cas, les
portances de toutes les pales fluctuent en phase (mode
circonférentiel de portance d’ordre B). Cette «coïncidence
aéroacoustique» entre le rotor et l’écoulement fait rayonner
en phase toutes les sources acoustiques élémentaires situées
sur les pales du rotor à la fréquence de passage des pales.
Lorsque la périodicité circonférentielle de l’écoulement est
doublée, c’est le mode circonférentiel de portance d’ordre
2×B qui est généré, les sources acoustiques élémentaires
rayonnent alors en phase à la fréquence 2×FPP, etc... Dans
ces cas de coïncidence entre la périodicité circonférentielle
de l’écoulement et un multiple du nombre de pales, le
rayonnement acoustique global est quasi dipolaire.
Quand la périodicité circonférentielle de l’écoulement n’est
pas égale à un multiple du nombre de pales, les portances
sont déphasées de pale en pale (modes de portance d’ordres
différents de B, 2B, 3B…). Il existe donc des interférences
destructives entre les différentes sources acoustiques situées
sur les différentes pales du rotor ; ainsi, le rayonnement qui
est associé à ce type d’interaction est beaucoup moins
intense (à tout le moins pour ce qui concerne les ventilateurs
subsoniques), et n’est plus dipolaire. Cependant, quand la
vitesse de rotation est très élevée, ce type d’interaction peut
devenir non-négligeable. Le bruit de charge stationnaire peut
aussi devenir prépondérant à grande vitesse de rotation
(soufflantes de turboréacteur par exemple).
En général, la non-uniformité de l’écoulement ingéré par
le ventilateur est la superposition d’un grand nombre
de périodici tés circonférent iel les de l ’écoulement
(décomposition en série de Fourier circonférentielle de
l’écoulement), ce qui induit un grand nombre de modes
de portance circonférentiels (décomposition en série de
Fourier circonférentielle de la portance). L’origine de cette
non-uniformité peut provenir de divers éléments mécaniques
interagissant avec l’écoulement (tels que radiateurs,
condenseurs, supports moteur, aubes de stator en amont
ou en aval du rotor, coudes dans un conduit,...).
Principe du contrôle
Pour contrôler la majeure partie du bruit de raie des ventilateurs
subsoniques, il suffit de contrôler le mode de portance le
plus rayonnant, c’est-à-dire celui engendré par la composante
circonférentielle nB-périodique de l’écoulement.
La méthode de contrôle que nous proposons [12] consiste
à tirer profit des mécanismes de génération du bruit de
raie que nous venons de décrire en ajoutant volontairement
une obstruction nB-périodique près du rotor (en amont de
préférence), placée de manère à ce qu’elle génère un mode de
portance secondaire nB d’égale amplitude mais en opposition
de phase par rapport au mode de portance primaire nB.
Une grande partie du rayonnement acoustique secondaire
se trouve ainsi en opposition de phase avec le rayonnement
acoustique primaire à la fréquence n×FPP (Fig. 1).
Cette méthode est passive au sens où le contrôle d’un son
pur généré par le ventilateur ne nécessite pas d’injection
d’énergie. Elle s’inspire aussi des méthodes de contrôle
actif dans le sens où la position des obstructions doit être
adaptée pour générer une onde acoustique en opposition de
phase avec l’onde primaire à contrôler. Cette méthode peut
aussi être adaptative pour suivre les éventuelles variations
temporelles de l’écoulement primaire. Nous parlerons alors
de contrôle passif adapté pour contrôler la partie stationnaire
de l’écoulement et de contrôle passif adaptatif pour contrôler
la partie instationnaire de l’écoulement. Dans toutes les
études menées sur le sujet, seule la composante stationnaire
de l’écoulement primaire a été contrôlée (contrôle passif
adapté). Les études antérieures [8-11] ont aussi montré
qu’avec des obstructions cylindriques il est difficile de
contrôler une fréquence particulière sans amplification de
ses harmoniques. En effet, les sillages saillants derrière
les cylindres induisent un écoulement et une distribution de
portance secondaire possédant un spectre circonférentiel
étendu. Dans cet article, nous nous intéressons donc à
la conception d’obstructions capables de contrôler une
seule fréquence à la fois, sans affecter les harmoniques
d’ordre supérieur, nous parlerons alors d’obstructions
harmoniquement sélectives. Il est ainsi possible d’utiliser
Fig. 1: Principe du contrôle du mode de portance le plus
rayonnant à la FPP pour un rotor à 6 pales