Page 40 - base

Version HTML de base

Spécial “ Acoustique sous-marine ”
39
Acoustique
&
Techniques n° 48
fois efficaces et robustes. Les fluctuations énergétiques
(observables à diverses échelles de temps) rendent peu
performantes les modulations basées sur l’exploitation de
l’amplitude ; les modulations de fréquence et de phase, aussi
affectées par le fading, sont très dégradées par l’effet Doppler
et par les retards temporels entre trajets.
Par ailleurs, les activités sous-marines utilisant des
transmissions sans fil doivent prendre en compte les
limitations de performances (débit, taux d’erreurs) associées
aux systèmes sous-marins ; elles ne sauraient en attendre les
mêmes qualités que celles obtenues dans l’air ou dans l’espace
avec les transmissions d’ondes électromagnétiques.
Techniques utilisées pour les transmissions
acoustiques sous-marines [2], [3]
Directivité d’antenne
Une solution préliminaire, simple et efficace dans de
nombreuses configurations, consiste à exploiter les figures
de directivité des antennes d’émission et réception pour
éliminer ou diminuer l’influence des trajets multiples. Cette
approche, qui est à recommander systématiquement quand la
structure du canal s’y prête, est spécialement efficace lorsque
la structure de trajets multiples correspond à de larges écarts
angulaires, donc dans des conditions de transmission verticale
ou oblique ; elle est de moins d’intérêt en transmission
horizontale, où les trajets multiples arrivent en paquets très
concentrés. Par ailleurs, la mise en œuvre d’antennes très
directives, efficaces en terme de filtrage, pose en contrepartie
le problème de leur pointage angulaire, qui doit s’adapter à
d’éventuelles variations de position des émetteurs-récepteurs.
Des stratégies de directivité adaptatives ont donc été étudiées
à cet effet, conduisant malheureusement à complexifier
sérieusement la structure des systèmes concernés.
Modulations
La structure pénalisante du canal de transmission sous-marine
(trajets multiples, Doppler, faible bande passante) limite
souvent dans la pratique la mise en œuvre de modulations
performantes (en terme de débit d’information) au profit de
solutions robustes (en terme de sécurité de transmission).
Les plus anciens systèmes de transmission acoustique sous-
marine (téléphone sous-marin analogique) étaient basés sur
des modulations d’amplitude d’une onde porteuse – avec des
résultats acoustiques d’une qualité très médiocre du fait de
la faible bande passante disponible et du fort impact des
perturbations physiques par le canal de transmission.
Des modulations fréquentielles sont utilisées depuis longtemps
pour la télécommande ou la transmission d’informations
numérisées : le principe de base est d’affecter des fréquences
différentes, avec des spectres convenablement disjoints,
aux divers symboles à transmettre. Dans la version la plus
simple de ce type de modulation (dite Frequency Shift Keying),
seules deux fréquences sont nécessaires pour transmettre
les bits « 0 » ou « 1 » ; mais on peut compliquer à loisir, et
transmettre simultanément plusieurs couples de fréquences,
de manière à augmenter le débit et exploiter au mieux la
bande passante disponible. La relative sécurité de ce mode
de modulation se paie par une médiocre efficacité spectrale
limitant les hauts débits ; l’augmentation du nombre de
fréquences utilisées et leur rapprochement spectral dégradent
la tolérance au Doppler et au fading. Certaines techniques
ont été dérivées de ce principe, reposant essentiellement sur
les transmissions de rampes linéaires de fréquences (Chirp,
permettant d’améliorer le rapport signal/bruit au niveau des
symboles individuels transmis) ou de techniques à évasion de
fréquence (Frequency hopping, destiné à combattre les trajets
multiples). Dernièrement, de nouvelles approches encore plus
audacieuses basées sur des techniques de transmission par
chaos (l’évolution de la fréquence porteuse suit un processus
chaotique donc extrêmement difficile à prévoir) explorent une
nouvelle façon de transmettre l’information.
Les modulations de phase permettent des performances
plus intéressantes en débit que les solutions fréquentielles
précédentes : l’information numérique à coder vient changer
la phase d’une onde porteuse à fréquence fixe (Phase Shift
Keying). Dans la version la plus simple, seuls deux états
de phase (espacés de
π
) sont nécessaires pour coder des
symboles binaires ; mais on peut mettre en œuvre des
modulations à plusieurs états de phase pour améliorer
l’efficacité de la transmission, avec un meilleur débit
numérique mais malheureusement une fragilité accrue aux
effets indésirables de modulation par le canal. Sur la base
de ce principe élémentaire, de nombreux raffinements ont
été apportés ces dernières années à l’instar notamment des
progrès observés dans les autres milieux de transmission
(câble ADSL, WiFi ou WiMax). Une première approche consiste
à observer que le canal de transmission acoustique présente
une certaine bande de cohérence (partie en rouge sur les
fonctions de transfert présentées auparavant) entrecoupée
par des évanouissements (partie en bleu). Sur cette bande
de cohérence, le canal se présente comme un filtre passe-
tout et cette particularité peut être exploitée pour utiliser des
modulations à haut rendement spectral. Ainsi, en partageant le
canal disponible (canal de transmission et transducteur inclus)
en sous-bandes sur lesquels le fading est moins prononcé, il
est possible d’accroître le débit de transmission. En intégrant
des raffinements supplémentaires (intervalle de garde sur
chacune des sous-porteuses, codage canal et utilisation
de la FFT en particulier), cette technique se rapproche ni
plus ni moins de l’OFDM (Orthogonal Frequency Division
Multiplex), technique largement utilisée dans le monde hertzien
notamment dans certaines versions de la norme WiFi. La
particularité apportée par le milieu acoustique sous-marin
réside dans l’identification a priori de ces sous-canaux et du
choix de l’ordre de modulation le plus approprié.
Une autre approche consiste à conserver la bande disponible
pour protéger le symbole à transmettre par l’insertion d’une
signature appelée aussi code d’étalement. Cette technique,
appelée étalement de spectre par séquence directe, permet
de superposer ou de faire cohabiter sur la même bande
fréquentielle plusieurs émissions. À la réception, le signal
désiré est aisément retrouvé par la connaissance de cette
signature, les autres signaux étant alors rejetés comme
du bruit. Cette technique forte attrayante et connue sous
le nom de CDMA (Code Division Multiple Access) est très
gourmande en terme de ressource spectrale et limite donc
le débit d’informations à la portion congrue. Néanmoins, des
techniques nouvelles basées sur le MIMO (Multiple Inputs
Multiple Outputs) pourront à l’avenir tirer profit de cette
technique en ajoutant chacune des voies de transmission à
une même application. Ainsi à la diversité temporelle, spatiale
et fréquentielle pourra s’ajouter une quatrième dimension, la
Les communications acoustiques sous-marines